RetroBright - Généralités
Je préviens d’avance : cette série d’articles fera sûrement bondir les puristes de la télécarte « dans leur jus » !
Lorsque j’ai recommencé ma collection, je suis rapidement tombé sur des cartes Solaic avec une teinte fortement jaunie voire tirant presque sur le marron. J’ai failli abandonner en me disant que ça ne valait pas le coup de garder des cartes qui se dégradent autant.
J’ai alors initié des essais sur des cartes sans valeur : bain d’eau oxygénée classique pendant une nuit puis eau de javel puis mélange des deux… Ces essais n’ont donné aucun résultat, mais même pour la javel, les cartes Solaic n’en sont pas sorties abîmées.
Alors j’ai poursuivi mes recherches sur le web et je suis tombé sur le « RetroBright » (retour à la blancheur). Le RetroBright a été développé dans les années 2000 par les amateurs d’anciennes consoles de jeux. Celles-ci étaient fabriquées en plastique ABS et avaient tendance à mal vieillir. Il y a des dizaines d’articles et de vidéos sur le web concernant des méthodes de RetroBright.
Je vais donc détailler ce qui marche bien en l’appliquant aux télécartes et en ayant beaucoup pratiqué.
Dégagement de responsabilité
Commençons par un point important : tout ce que vous ferez en essayant d’appliquer ce qui est expliqué dans les articles RetroBright se fait sous votre propre responsabilité.
Je ne peux en aucun cas être tenu pour responsable :
- du résultat des essais que vous ferez et des dommages qui pourraient en résulter pour vos cartes
- des effets liés à la manipulation des produits. Le RetroBright implique de manipuler du péroxyde d’hydrogène qui un produit nécessitant des précautions d’emploi. Cela implique :
- de porter des gants (pour ne pas se brûler ou décolorer la peau)
- de mettre des lunettes de protection (pour éviter tout risque d’éclaboussure dans les yeux)
- de stocker le produit en sécurité pour qu’il ne soit pas accessible à quelqu’un qui en ignore les dangers
- des dégâts sur le côté fonctionnel de la puce. J’ignore en effet si le processus a un effet sur la possibilité de lire le nombre d’unités, même si j’ai des bonnes raisons de penser que ça ne doit pas en avoir
On ne manipule pas pour autant de la nitroglycérine et on prends vite l’habitude de ces précautions indispensables.
Les plastiques des fabricants
Dans TéléPuce n°4, on abordait page 3 le côté technique de la fabrication des cartes et notamment des plastiques.
Toutes les cartes n’ont pas vieilli de la même manière et n’ont pas le même degré de fragilité. Il y a 3 fabricants historiques : Bull, Schlumberger et Solaic. Ils ont commencé avec les cartes pyjamas. Bull a fabriqué 2 précurseurs, Solaic 4 et Schlumberger 2.
Bull
Bull a cessé de produire des cartes dès l’apparition des illustrées fin 1987. Les cartes Bull ne sont pas fragiles mais ont la plupart du temps une surface glacée qui peut être sensible aux rayures. Cette puce ronde était tellement sympa !
Schlumberger
Fabricant de la première heure, Schlumberger est celui qui, au delà du plastique, a utilisé le plus de puces différentes.
Le plastique des cartes Schlumberger a très bien résisté dans le temps, et ce sont ses cartes qui sont globalement les moins fragiles. En revanche, les puces couleur argent s’oxydent. On en parlera dans le forum. Seules quelques cartes dotées d’une SC7 qui ont dû faire l’objet de variantes de fabrication ont jauni.
Solaic
Solaic aussi a utilisé un nombre important de puces. C’est peut-être le seul à avoir utilisé du plastique ABS (Acrylonitrile Butadiène Styrène). C’est un plastique peu fragile, très résistant, mais en contrepartie, il vieillit mal et on va expliquer pourquoi.
Gemplus
Gemplus a rejoint le trio de fabricants début 1989. Ses cartes ont aussi très bien résisté au temps, mais selon les cartes, certaines sont d’une fragilité effroyable pour les collectionneurs. Il faut parfois en passer des dizaines du même visuel pour en avoir une en état luxe, en particulier lorsqu’elles sont à dominante noire. Pour autant, certaines ont du avoir un traitement de surface spécifique car malgré leur apparence, elles ne sont pas fragiles (Quelyd par exemple).
Oberthur
Imprimeur de billets de banque, Oberthur a commencé à fabriquer quelques télécartes en 1993, puis après une grande pause a repris sa fabrication en 1996. Ses cartes sont globalement de bonne qualité et sont aussi bien conservées dans le temps. On observe quand même parfois que le plastique se gondole légèrement.
Trois fabricants sont venus compléter la production : Landys&Gyr, Schlumberger-Axalto et Orga. Ces trois fabricants ont produit un grand nombre de cartes sur la fin, mais peu de visuels différents.
Landys&Gyr
Les cartes L&G sont assez semblables aux Gemplus : elles sont parfois laquées et sont bien conservées. L&G a produit à partir de 1998.
Orga
Orga est un fabricant allemand qui a imprimé une seule carte en 1998 puis a recommencé à produire les grandes séries à compter de 2004. Ses cartes sont légèrement glacées et ont tendance à jaunir.
Axalto
Axalto a commencé à produire des télécartes en 2003. C’est une émanation de Schlumberger d’où l’acronyme SA (Schlumberger-Axalto) pour les puces.
Les cartes concernées par le RetroBright
Au regard des éléments précédents, les cartes pouvant être traitées en RetroBright sont donc : les Solaic, quelques Schlumberger, quelques Axalto… Je n’ai pas fait beaucoup d’essais sur les Schlumberger et Axalto (ils ont été néanmoins concluants y compris sur une Tony Garnier !), mais j’ai fait des dizaines de RetroBright sur les Solaic.
Du fait de leur composition et de leur impression, les cartes Gemplus ne sont pas adaptées à un traitement RetroBright.
Ca fait déjà beaucoup de cartes et il faut réserver le processus aux plus jaunies qu’on veut récupérer, car cela demande du temps et un espace sécurisé pour que personne n’accède au matériel en cours d’utilisation.
Pourquoi certains plastiques jaunissent ?
Les cartes en ABS de Solaic sont donc les principales concernées.
Sans rentrer dans un niveau de détail trop rébarbatif (mais les plus curieux pourront consulter la page de liens), l’ABS contient des particules de brome qui est un retardateur de flamme. Avec le temps, les particules de brome contenues dans l’ABS migrent à la surface et c’est ce qui engendre le jaunissement.
L’exposition aux UV accélère le jaunissement, mais quelques cartes à puce que j’avais encore et qui n’ont jamais vu le soleil ont aussi jauni.
Le processus est réversible. On peut lire tout et son contraire sur le RetroBright : le jaunissement revient très vite, le plastique est fragilisé, …
Je vous invite à consulter les liens « C’était jaune », qui sont très bien documentés et ont beaucoup de recul en ajoutant que c’est beaucoup plus facile de traiter des télécartes que des consoles de jeu.
Pour ce qui me concerne, l’expérience est très concluante et je préfère mes cartes lorsqu’elles ont un niveau de blanc correct…
Le principe du RetroBright
Une fois les causes du jaunissement comprises, les « retrogamers » ont trouvé le bon cocktail permettant de blanchir leurs consoles et ça fonctionne aussi sur les cartes.
A la base, ma première idée n’était pas si mauvaise : quand on pense au blanchiment, on pense instinctivement à l’eau oxygénée au bicarbonate et à la javel. Mais l’eau oxygénée de base n’est pas suffisante.
Il faut en fait utiliser ;
- de l’eau oxygénée très concentrée (peroxyde d’hydrogène) à 12% (40 volumes). Il existe du peroxyde plus concentré, mais le 12% est suffisant car on a une petite surface qu’on peut faire tremper facilement à blanchir a contrario des corps de consoles ou d’ordinateur qui nécessitent une meilleure optimisation du processus et des produits
- un catalyseur de blanchiment : le TAED (Tétra Acétyl Ethylène Diamine) : c’est un produit qu’on trouve dans certaines lessives ou adjuvants de lavage en plus ou moins grande quantité. Pour faire un raccourci, c’est « l’oxygène actif »
- des ultraviolets pour avoir un blanchiment plus rapide et efficace
Dans les articles et vidéos consacrés au RetroBright, il y a des tas de variantes qui parfois aboutissent à des poudres pâteuses ou contiennent d’autres produits exotiques. Le concept et les produits de base sont à mon sens suffisants.
Les pages suivantes de la rubrique détaillent le matériel nécessaire et le processus de blanchiment.